jeudi 16 octobre 2025

Faits reprochés à Carrier, avant sa mise en accusation

 

Les faits reprochés à Carrier et ses réponses

avant sa mise en accusation par la Convention


Les faits reprochés sont les 82 accusations, étayées par un témoignage, (courrier, déposition, acte administratif etc.. ) que Gilbert Romme, énumère, sans se prononcer sur leur validité, le 11 novembre 1794 à la Convention afin de motiver l’avis de la commission dite des 21.
Les réponses sont celles apportées, du 21 au 23 novembre, sur ces accusations, par Carrier, à la Convention constituée alors en jury d’accusation.

Séance du 21 novembre 1794
01 et 02 - six jours après son arrivée à Nantes, il s’est répandu en imprécations les plus véhémentes contre les nantais, les négociants, les menaçant d’arrestations et de fusillades. Il a traité son collègue Ruelle qui essayait de le modérer de révolutionnaire à l’eau douce.
Carrier : Giraud (le témoin, directeur des postes à Nantes) est un fanatique, un fédéraliste, un royaliste, partisan des prêtres réfractaires, et sa déclaration est fausse. Son collègue représentant, Ruelle peut en témoigner (mais il est absent).

03- il a tout fait pour provoquer une émeute à Nantes afin de la déclarer en insurrection.
R : il aurait été la première victime d’une émeute et il n’y a aucune preuve d’une quelconque préparation qu’un tel complot aurait nécessitée.

04 – il a déclamé publiquement contre les riches, a traité les nantais de contre révolutionnaires
R : il a toujours privilégié ceux qui n’ont pas de fortune, premières victimes dans une révolution. Concernant les habitants de Nantes, tous les prisonniers républicains, et il en délivré 10 000, ont dit que les brigands obtenaient des renseignements dans cette ville. A l’attaque du 29 juin (sur Nantes) 4 000 repas et 4 000 drapeaux blancs étaient déjà préparés.

05 – il désignait les riches à dépouiller, partageait le butin avec ses complices et provoquait le peuple contre les négociants.
R : il a pris avec Francastel un arrêté contre les accaparements. Il a tout au plus avec sa femme 10 000 livres de capital. Ses collègues connaissent sa probité et son dénonciateur, Orieux, est un ancien pilier de tripot de jeu, devenu huissier, qui se vend au plus offrant.

06 – lors d’un repas il a souhaité voir Nantes en contre révolution pour pouvoir la châtier.
R : Cette déclaration d’un domestique qui ne sait pas signer, est non recevable, car elle n’a pas été validée par un officier public. En outre il a toujours lutté contre le fédéralisme, dans les ci-devants Normandie et Bretagne, à Rouen, Cherbourg, Rennes. Ses collègues peuvent témoigner du bien qu’il y a fait.

07 – toutes les familles étaient réduites à une demi-livre de mauvais pain par jour et il menaçait de déclarer Nantes en état de rébellion.
R : c’est encore Orieux qui le dénonce, mais après la reprise de Toulon, et la victoire de Savenay, un peuple immense est venu chez lui. Aucun nantais ne s’est plaint. La terreur est d’ailleurs attribuée au comité révolutionnaire, qu’il n’a pas constitué, et jamais l’alimentation n’a été réduite à une demi-livre de pain. Pendant 6 mois Nantes n’a reçu aucun secours, et il a alimenté 100 000 hommes par des réquisitions. C’est après son départ qu’il y a eu disette.

08 – il critiquait le comité révolutionnaire, insultait ses membres, disant que 500 têtes devaient tomber.
R : il n’a vu qu’une seule fois son dénonciateur, Throuard, dont il avait arrêté le gendre et qui aurait entendu cela derrière une porte. (il s’agit probablement de François Kirouard, capitaine de navires et négociant, dont la fille aînée Marie Julie était mariée avec Joseph Marie Dorvo, un des 132 notables nantais. Kirouard a également témoigné au second procès des guides du château d’Aux)

09 – il a avec justesse écrasé le négociantisme, tonné contre l’esprit aristocratique et fédéraliste.
R : il a écrasé l’accaparement, pas le commerce. Pour preuve il a permis à des négociants d’aller en Amérique. (Schweighauser et Cosson)

10- il a autorisé le transfert d’un budget de 183 000 livres à la municipalité à charge de le remplacer par un budget additionnel ou une imposition sur les riches.
R : il a oublié d’apporter cette pièce mais peut la produire.

11, 12 et 13 - il a fait arrêter sans exception tous les courtiers, « métier scandaleux » a renouvelé cet ordre en ajoutant les commerçants des denrées de première nécessité, complices des accapareurs vendant au dessus du maximum autorisé et a fait arrêter tous les interprètes, acheteurs et revendeurs.
R : cette engeance, les courtiers, a apporté de Paris l’esprit de monopole et d’accaparement. Des patriotes lui ont dénoncé des reventes au dessus du prix maximum. Il a donc fait cesser ces abus et personne ne s’en plaint aujourd’hui.

14 - il s’est fait donner les motifs des arrestations des suspects de Nantes et ceux envoyés à Paris.
R : ce n’est pas un crime.

15- pour un problème de réquisition de grains bloquée près de Saumur, il a renvoyé durement une délégation qui a dû se retirer. Le département lui a donc demandé par un arrêté d’avoir des discussions plus faciles.
R : Il n’ a pas été dur mais calme. Parce qu’il devait d’abord écrire à ses collègues afin de connaître les raisons de l’embargo.

16 – il a molesté Mulonnières, juge de paix et son greffier qui refusait une levée illégale de scellés.  R : C’est toujours Orieux qui le dénonce.

17 - il reprochait au comité révolutionnaire de Nantes de ne prendre que des demi-mesures.
R : c’est faux et cette déclaration est faite par un accusé (Goullin, du comité révolutionnaire de Nantes) et n’a donc aucun poids.

18 – il protégeait le comité révolutionnaire qui a fait tant de mal à Nantes.
R : Il n’y a aucun acte qui le prouve et d’ailleurs celui qui le déclare (Phelippes-Tronjolly) est un coblentzien, fédéraliste. Il n’est donc n’est pas crédible.

19 - il n’était accessible qu’aux gens de l’état-major, invisible pour les administrateurs, les patriotes.
R : c’est vrai, pendant la guerre de Vendée il était très occupé avec les généraux et il n’a jamais voulu prendre de décision militaire en présence de civils, par sécurité. Les mesures qu’il a prises avec les chefs de l’armée ont conduit à 18 victoires successives.

20 – il a discrédité les administrations locales, les traitants de sots et de fripons.
R : C’est encore l’huissier Orieux. C’est faux et personne ne s’est plaint.

21 et 22- il a fait amener de force devant lui un officier municipal, Champenois et l’a destitué.
R : Champenois voulait 200 hommes pour capturer Charette. Cela lui paraissait suspect et il l’a renvoyé.

23 – il a reçu brutalement, insulté puis destitué Jean Baptiste Lacour, administrateur du district (et adjudant général de la garde nationale de Nantes) pour le faire revenir plus tard et s’excuser. Il l’avait cru aristocrate. Il a chargé un secrétaire insolent de recevoir les délégations de la société, a fait arrêter de nuit, maltraité, et menacé de mort ceux qui s’en plaignaient.
R : il n’a jamais donné l’ordre à son secrétaire de mal recevoir les délégations. Il n’y a que Champenois et Julien fils qu’il a fait arrêter. S’il y en avait d’autres ils n’auraient pas manqué de se plaindre.

24 – il a reçu des patriotes, des officiers municipaux qui demandaient des subsistances, car réduits à une demi-livre de mauvais pain par jour, avec des soufflets, des coups de sabre.
R : Un des dénonciateurs est Lebeaupin, ( peut-être François Jean Lesbeaupin, huissier 1748-1812) venu de Rennes, certainement contre révolutionnaire et royaliste. Jamais la ration quotidienne n’a été d’une demi-livre de pain et les habitants n’ont souffert aucune réduction de subsistance. Il affirme que pendant 6 mois qu’il est resté à Nantes il n’a reçu aucun secours du gouvernement, seul son collègue Bréard lui a envoyé un convoi. C’est grâce au bon ordre qu’il a appliqué et aux réquisitions tirées de la Vendée que Nantes a été sauvé.

25 – il n’a jamais voulu écouter ou recevoir de délégations sur la situation locale, la guerre, les subsistances, pour les informer.
R : il a constamment reçu les délégations, sauf quand il s’agissait de secrets militaires. D’ailleurs tous les renseignements donnés sur la guerre par les corps administratifs étaient faux.

26- il a dit à un magistrat qui demandait du pain pour sa commune que la sentinelle avait eu tort de ne pas lui passer sa baïonnette à travers le corps.
R : c’est une calomnie. Le maire de Nantes a forcé sa porte en dehors des consignes, il aurait pu être tué et il l’a prévenu du danger.

27 – en séance du 15 décembre à la société populaire, Champenois alerte sur le blocage de la réquisition de grains destinée à Nantes, une délégation sera envoyé au représentant pour qu’il s’explique.
R : …

28 – il a écrit au général Haxo que les ordres de la Convention était de tout brûler, tout exterminer en Vendée et de rapatrier toutes les réquisitions à Nantes, sans rien laisser (lettre citée en entier)
R : cet ordre est conforme aux décrets de la Convention nationale. S’il a usé du terme « habitants » au lieu de « brigands » c’est une erreur. En Vendée où il s’est constamment battu contre Charette il n’a poursuivi de concert avec Haxo que les brigands. Aucune commune ne s’est soumise mais quand les brigands se rendaient, il les protégeait. Aucun reproche d’ailleurs n’a été adressé à Haxo dont le nom est inscrit au Panthéon.

29 – il se dit malade et on le voit en ville. Il a des espions, fait régner la terreur contre les patriotes.
R : c’est Julien fils qui témoigne et il était bien au lit, malade, quand il est venu. Sur 40 jours il n’a pas dormi 20 heures. Il n’avait pas d’espions sauf en Vendée et a toujours refusé d’intercepter les correspondances. Il a eu tort.

30- il menace de mort un volontaire qui lui fait remarquer la faiblesse d’une escorte. Le convoi est pris, 12 hommes tués.
R : le témoin, Dechartres avait la confiance des brigands ! Il prétend lui avoir parlé le 18 octobre puis avoir été arrêté, mais lui, Carrier, était à Cholet à cette date pour combattre les brigands. Quand il était à Nantes pas un seul convoi n’a été pris. Il les faisait escorter de 300 hommes au moins.

31 – le cuisinier de Carrier s’approvisionne au marché avant les autres, largement et à tout prix.
R : « Comme on porte contre moi l’esprit de rage et de méchanceté ! ». Il ne s’est jamais soucié de ses repas. Né dans les montagnes d’Auvergne il est habitué à la frugalité.

32 – il a menacé d’un chandelier Trouard, (Throuard/Kirouard voir accusation n° 8) qui demandait qu’un des notables devant partir à Paris, malade, puisse rester sur place (Dorvo).
R : c’est faux

33- à la société populaire il n’avait que la menace à la bouche et le sabre à la main.
R : jamais, mais quand il arrivait de l’armée, avant même de rentrer chez lui, il avait encore le sabre au côté.

34 – il ne sortait pas de la banlieue de Nantes.
R : encore Orieux ! Si on pouvait entendre tous les défenseurs de la République ! La société populaire a déclaré elle-même qu’il était l’un de ceux qui a le plus contribué à achever la guerre de Vendée.

35 – à la suite d’une défaite militaire à Mortagne (23 mars 1794) une délégation voulut rencontrer Carrier pour avoir des explications. La scène fut si violente qu’elle fut consignée au procès verbal de la société. Le lendemain Carrier, le sabre à la main menaça de déclarer Nantes en état de rébellion et de faire venir 60 000 hommes pour la détruire. Il fit fermer la société pendant 3 jours et demanda à se faire porter les registres.
R : il y a un faux matériel dans cette déclaration de Lebeaupin, le contre révolutionnaire. Le jour de la déroute de Mortagne il était à la Convention. Il y a un second faux lors de la séance citée, son collègue Lequinio y était et peut témoigner.
Lequinio intervient. Il s’est trouvé à une séance où on reprochait à Carrier d’avoir le sabre à la main et de battre quelqu’un, mais il n’a rien vu de tel.
R : Le faux témoin est reconnu ! Ah si les survivants qui ont fait la guerre avec lui pouvaient entendre toutes ces horreurs ! Il a vu dernièrement un défenseur de la patrie, couvert de blessures en verser des larmes de sang. Ce sont tous de faux témoins, tous aristocrates, tous coquins, tous brigands qui se coalisent. Quand il est parti de Nantes il n’y avait pas 300 brigands, sans munitions, sans ravitaillement. Tandis qu’aujourd’hui ils sont bien pourvus. Ils tiraient dès le début, leurs provisions de Nantes, ils étaient alors 250 000 avec 300 canons... Concernant la société populaire il a pris la décision de la suspendre avec plusieurs patriotes pour la rétablir ensuite, de concert avec eux.

36 – une autre version de cette fermeture est donnée par un procès verbal de la société populaire. Lors de la séance du 15 décembre (1793) un militaire a montré le pain distribué à la garnison que, Vimeux lui-même (commandant de Loire-Inférieure, futur remplaçant de Turreau) a reconnu être de mauvaise qualité.
R : ce militaire, chef de bataillon, était un déserteur et ce n’est pas à cause de la qualité du pain que la suspension a eu lieu, c’est en concertation avec les patriotes.

37 – il a maltraité et n’a pas voulu entendre une délégation qui proposait de former une escouade pour capturer Charette.
R : c’est faux et il ne voulait pas risquer la vie de 250 hommes.

38 – pour le même motif, une délégation de la société Vincent la Montagne, a été maltraitée. ( il s’agit probablement de la même accusation mais par un témoignage différent).
R : ce n’est pas de sa faute si son secrétaire s’est mal conduit.

39 – Charles Dechartres, (voir accusation n° 30) évadé après plusieurs mois des mains des brigands, et deux officiers municipaux envoyés par le département, avaient un plan pour combattre les brigands qui ne voulaient pas traverser le Loire. Carrier les a fait mettre en prison, les traitant d’aristocrates et d’imposteurs.
R : Faux, il ne les a pas insultés et la manœuvre proposée a été réalisée par son collègue Merlin. De plus cette histoire lui paraissait suspecte. On avait trouvé dans ses poches (de Dechartres?) des cocardes blanches et des ordres des brigands.

40 – leur directeur (Jean Yves Alexis Prigent) étant emprisonné, les employés des transports abandonnent les chevaux qui meurent dans les rue, les voitures sont cassées. L’inspecteur général (Guimberteau) d’abord mis à la porte de chez Carrier est ensuite mal reçu. Il dit qu’il se f… de ces régies et qu’il les ferait guillotiner quand il s’en occuperait.
R : l’altercation a eu lieu avec le secrétaire, pas avec lui et tout s’est terminé aimablement. Il ne pouvait pas destituer les employés négligents par manque de remplaçants patriotes. Il avait d’ailleurs écrit au ministre pour avoir du renfort. L’inspecteur a sollicité un certain Blondel, employé du comité de salut public qui est venu à Nantes. On pourrait le faire témoigner. Quand il lui dénonçait des dilapidations, il sévissait.

41 – Francastel et Carrier approuvent la formation de la compagnie Marat par un arrêté (cité en entier). Ils donnent des pouvoirs de surveillance, de perquisition et d’arrestation à Joseph Padioleau.
R : on lui avait recommandé Padioleau un patriote qui connaissait bien Nantes. Il fallait exercer une surveillance dans une ville assiégée. Le peuple se plaignait, manquait de tout, la disette était extrême.

42 – Carrier accorde une solde 10 livres par jour aux membres de cette compagnie.
R : il n’y a pas de crime à cela.

43 – il met la compagnie Marat sous la surveillance du comité révolutionnaire dont 3 membres doivent signer les arrestations et perquisitions.
R : c’était un surcroît de protection pour une compagnie qu’il ne connaissait pas.

44 – Il confirme un arrêté du comité révolutionnaire de Nantes d’arrêter et faire conduire à Paris toutes les personnes soupçonnées d’un complot.
R : on lui a montré des lettres prises sur des brigands. Il y a avait des complots.

Mais la voix de Carrier est devenue à peine audible et la séance levée à 21 h est reportée au lendemain.


Séance 22 novembre 1794
Après discussion, la Convention décide de faire évacuer du public tous ceux qui n’ont pas été admis officiellement à la séance (a priori nombre de curieux). Toutes les tribunes sont pleines.
Le président réclame le calme et remarque « que c’est un jour de deuil pour la République, celui où un représentant est réduit à répondre à des accusations portées contre lui » et ensuite « … que la position d’un accusé est la plus respectable pour l’humanité »..

Carrier commence à lire mais on l’entend mal. C’est donc un secrétaire, pour lui éviter de la fatigue qui va lire les accusations.

45 – Il a confirmé un arrêté du comité révolutionnaire nommant Étienne Dardare inspecteur du convoi des prisonniers vers Paris, avec des pouvoirs « les plus étendus »
R : cela dépose en sa faveur. Il a accepté de faire traduire au tribunal révolutionnaire des prisonniers. Prieur en est témoin.

46 – Lebatteux à la tête d’une armée révolutionnaire dans le Morbihan a fait fusiller sans jugement, a levé des contributions, a tenté un coup de force militaire. Il a donc été arrêté par le représentant Tréhouart. Carrier l’a fait libérer, a insulté et menacé son collègue. Lebatteux a poursuivi ses exactions.
R : Prieur et Bourbotte savent que le département était proche de s’insurger. Il a donc demandé au général Avril d’intervenir. Redon étant la clef de passage entre la Bretagne et la Vendée, le procureur syndic et Lebatteux ont demandé une force armée pour résister. On avait trouvé dans le Morbihan une liste de généraux qui devaient commander 30 000 hommes et 4 représentants ont été envoyés. Il a confié à Lebatteux, un patriote, un bataillon de l’armée de Mayence. Ce n’était donc pas une armée révolutionnaire. Si Lebatteux en a abusé, ce n’est pas de sa responsabilité. Il admet avoir écrit une lettre « un peu âpre » mais il n’a pas dit « scélérat ». Il leur a écrit ensuite une lettre « la plus honnête, la plus amicale ». Il ne connaissait pas Tréhouart mais quand il a vu les anglais, les émigrés prêts à débarquer, les troubles s’amplifier, il a pris cet arrêté. C’est vrai. Il a eu grand tort. Depuis il a revu Tréhouart.
Dubignon, collègue député, témoigne que l’arrêté confiait à Lebatteux un bataillon de Mayence pour combattre les contre révolutionnaires.
R : il n’y a donc rien de condamnable.

47 – Il a confirmé la nomination de « gens sans mœurs » au comité révolutionnaire.
R : ne connaissant personne à son arrivée il a fait confiance aux personnes placées par ses prédécesseurs Philipeaux, Ruelle et Gillet.

48 – il a apuré les comptes de Normand qu’il avait nommé directeur de l’hôpital des Ursules, nommé de jeunes muscadins Caylus et Fonbonne, officiers de santé, ainsi soustraits à la réquisition.
R : Normand avait été nommé avant son arrivée et ses comptes ne sont toujours pas apurés.
Bô confirme le fait. Caylus a étudié à Montpellier, et Fonbonne, père de 3 enfants a eu l’estime d’autres collègues.
R : Ce sont donc deux faux matériels. Fonbonne a été nommé alors que lui, Carrier, couchait au bivouac. Ce sont des faux multiples « de contre révolutionnaires, de conspirateurs, de complices des brigands qui poursuivent un patriote, le vainqueur et le destructeur de la Vendée ».

49 – le comité révolutionnaire a fait noyer 80 prêtres réfractaires âgés, soumis à la déportation.
R : il a toujours ignoré si c’est le comité révolutionnaire qui a pris la décision. Après il en a simplement fait part à la Convention. On lui a dit qu’ils étaient morts naturellement.

50 – Après les avoir fait noyer Carrier a fait une orgie avec le comité révolutionnaire.
R : Maintenant c’est lui qu’Orieux, auteur de faux multiples, (huissier déhonté, concussionnaire reconnu ...), accuse. Plusieurs de ses collègues le connaissent depuis l’âge de 14 ans, l’ont-ils vu faire des orgies ?

51 – c’est lui qui a donné l’ordre de la noyade.
R : C’est Bachelier (secrétaire du comité révolutionnaire nantais, en jugement) qui se disculpe sur lui.

52 – Carrier, Rollin, un médecin chef et Laurent, dépensier de l’hôpital, ont bu « à la santé des calotins qui avaient bu la grande tasse ».
R : C’est le témoignage d’une cuisinière mécontente de ses employeurs (Olive Recapet, cusinière chez les Normand). Comment des hommes « ayant un cœur et une âme » pourraient faire une chose si horrible ? La témoin ne sait pas signer et son témoignage est isolé, non garanti par serment.

53 – un nommé Foucault jeune, employé à la noyade des prêtres a ordonné à un certain Sourisseau de laisser son portail ouvert toute la nuit pour une expédition secrète.
R : il paraît que Sourisseau est un vendu. Lui, Carrier, n’a jamais connu Foucault. Qu’on le condamne à mort si on trouve un ordre écrit de sa part à ce sujet. C’est une déclaration faite sans serment, reçue par un comité qui lui cherche des ennemis.

54 - Carrier a provoqué la mort de nombreux soldats, à cause des cadavres laissés à l’air plusieurs mois, et celle de nombreux gardiens suite à l’odeur pestilentielle des prisons.
R : encore le faux témoin Orieux ! Il y a eu une épidémie apportée par les brigands. Il a alors constitué une commission de santé, ordonné des fumigations et c’est lui seul qui a eu l’idée de faire nettoyer chaque recoin de Nantes avec des pompes à eau. L’épidémie cessa. Les officiers de santé peuvent en témoigner.

55 – il y a eu à Nantes une épidémie dans l’entrepôt, où la commission a jugé pendant 1 mois, 150 à 200 brigands par jour, soit 4 000 au total.
R : il n’est pas responsable de l’épidémie et ne s’est pas mêlé des jugements qu’il ne pouvait ni empêcher ni provoquer. Il y a eu moins de 3 000 brigands dans cet entrepôt.

56 – 24 brigands dont 2 de 13 et 14 ans, puis 27 des deux sexes, pris les armes à la main ont été exécutés sans jugement, par un arrêté de Carrier.
R : Il a pu signer de confiance. Mais ces arrêtés ne sont ni de sa main ni de celle de son secrétaire. D’ailleurs il avait interdit de juger les enfants de 12 à 16 ans. (Il lit un arrêté du 2 mars 1794 de Bourbotte, Turreau et lui dans ce sens). C’est Bourbotte qui a limité à 16 ans, Turreau et lui voulaient le porter à 18 ans. On peut prouver que de jeunes brigands sont encore dans des familles. L’arrêté des exécutions en lui-même est conforme aux ordres de la Convention. (il veut lire le décret du 19 mars 1793)
Boudin intervient pour demander qu’on lise ensuite l’arrêté du 1 er août (qui restreignait celui du 2 mars)
R : Carrier lit la proclamation du 17 octobre où la Convention exigeait la fin de la guerre de Vendée avant fin octobre, puis le décret du 19 mars sur la mise hors de la loi des brigands pris les armes à la main « et ceux qui auraient servi leurs projets »
Clauzel prend la parole pour demander la lecture de l’article 2. (L’article porte que le fait doit être constaté par une commission militaire, avec exécution dans les 24 h).
S’ensuit une discussion entre Clauzel, Carrier, un député non nommé, Boudin, Monestier, Dubois-Crancé, sur les originaux des arrêtés de Carrier qui demande à les voir, et les décrets de la Convention. On donne ensuite lecture des dispositions qui ne prévoient que la détention pour les brigands qui déposent les armes et dénoncent leurs chefs et précisent ensuite de transporter les femmes, les enfants et les vieillards à l’arrière.
R : Avant son arrivée, on fusillait déjà les brigands sitôt pris les armes à la main.
Clauzel indique que sur le champ de bataille ce sont les lois de la guerre mais qu’ensuite les prisonniers doivent être jugés.
R : les brigands de ces arrêtés avaient été pris les armes à la main et il avait excepté les femmes et les enfants par un arrêté.
Des voix : 2 mois après !
R : ces arrêtés sont contradictoires. En outre plusieurs collègues et des généraux ont écrit à la Convention, qui a applaudit qu’on fasse fusiller sans forme de procès
Lequinio prend la parole pour raconter comment il a mis fin à une mutinerie dans une prison. Ensuite, étant menacé par l’armée de Charette à Fontenay il a écrit dans une lettre que si la ville était prise il ferait fusiller sans jugement les prisonniers. (On murmure). Mais c’était un piège pour arrêter les troupes de Charette !.. qui a réussi, puisque Fontenay a été sauvé.
R : Carrier précise que ce que dit aujourd’hui Lequinio n’était pas dans le bulletin qui relatait sa lettre... Lui était dans une situation bien pire à Nantes qui fournissait (en secret) des secours, des vivres, des munitions aux quatre armées de brigands déjà à ses portes, avec des conspirations dans les prisons. Le commandant de la ville a fait tirer à mitraille sur 2 000 prisonniers en insurrection. De plus il doit voir les arrêtés qu’on lui reproche. Ils ne sont pas écrits de sa main ou de celle son secrétaire et peut-être ne les a t-il pas signés.
S’ensuit une nouvelle et longue discussion entre Gay-Vernon, Clauzel, Boudin, Carrier, Bourdon de l’Oise, Merlin de Douai, Bentabole, Bernard, Cadroy, Lefiot où il est question de l’authenticité des deux arrêtés de Carrier, sur la mission, non pas de jugement mais de jury d’accusation dévolue à la Convention, des droits de la défense. On lit les deux arrêtés en cause avec une distinction sur l’ordre des exécutions à faire « sur le champ » ou « sans jugement ».
R : Carrier reprend sa défense et dénonce : « toutes les femmes, tous les enfants qui ont passé la Loire se sont battus comme les brigands. A Dol un bataillon de femmes s’est battu contre nos tirailleurs. A Pontorson, les enfants se sont battus, ainsi qu’elles aussi bien que les hommes. Les femmes étaient à l’avant-garde à Château-Gontier. A la bataille de Laval les femmes ont égorgé nos prisonniers ». On peut le prouver. Il demande ensuite qu’on apporte les pièces originales de ses arrêtés.
Guérin prend la parole pour remarquer que c’est au tribunal d’apprécier l’authenticité des arrêtés. Pour lui si un représentant ordonne de faire exécuter sans jugement il est coupable et le second arrêté le précisait. Il a fait partie de la commission des 21 et déclare que pour lui il y a assez de preuves pour un décret d’accusation contre Carrier. La Convention demandait de frapper les hommes de l’Ancien Régime or il n’y a que de malheureux cultivateurs sur les listes.
Un autre député proteste.
Milhaud (député du Cantal et cousin de Carrier) prend la défense de Carrier. Il faut se conformer à la procédure, à la justice et voir si des individus, malgré leur âge ou leur sexe ne méritaient pas la vengeance des Français. On a vu des enfants de rebelles périr en criant « vive le roi » comme Bara est mort en criant « vive la liberté ». Il faut apporter les originaux des arrêtés de Carrier.
Bentabole rappelle que la Convention doit se prononcer suite au rapport de la commission des 21, donc (fonder sa conviction) sur un ensemble des pièces. Il faut poursuivre l’ordre du jour.
Suite à la proposition du président de mettre aux voix cette proposition, Bourdon souhaite aussi que la sienne soit examinée. Il veut une justice sévère mais impartiale. Un représentant du peuple ne doit pas être jugé sur des pièces collationnées, surtout que des faits reprochés à Carrier « font frémir la nature ». Lui-même avec Goupilleau a failli être exécuté pour avoir sauvé 12 000 brigands. Il faut donc des preuves, et les originaux des arrêtés.
D’autres députés interviennent parfois longuement : Clauzel, Pelet, Durand-Maillane, Mailhe. La décision de faire apporter les pièces, en urgence, pour ne pas retarder les discussions est décrétée. Mais plusieurs amendements perturbent la séance.
Clauzel demande que ce soit une escorte, par sécurité, qui aille chercher les originaux (à Nantes).
Boudin indique que ce sont toutes les pièces du procès Lamberty/Fouquet qu’il faut apporter.
Tallien « demande qu’on fasse venir les cadavres des malheureuses victimes ».
S’ensuit un brouhaha. Cambacérès propose alors une motion d’ordre. Il ne faut perdre du temps dans des discussions qui n’aboutiront à rien et qui empêche le gouvernement de fonctionner. L‘appel nominal, comme pour Capet et Marat, durera 24 heures. Il faut donc restreindre les débats entre 2 à 5 h tous les jours sur cette question.
Bentabole défend le travail de la commission des 21. Elle n’a pas donné son opinion à la légère. Toutes les mesures proposées sont dilatoires.
Carrier essaye en vain d’intervenir à 2 reprises. Bentabole souligne de nouveau que c’est au tribunal d’apprécier la culpabilité, pas à la Convention. Marec, Milhaud, Thuriot, Merlin de Douai, Reubell échangent parmi des interventions spontanées sur l’opportunité de faire chercher les arrêtés.
Milhaud souligne que la Convention a mis plusieurs mois à juger Capet « cet usurpateur de la souveraineté nationale » et on voudrait juger de suite un représentant du peuple !
Thuriot et Merlin souhaitent qu’on aille chercher les arrêtés, Reubell remarque que la procédure devient interminable. Tallien répète que la Convention est un jury d’accusation pas un tribunal. Bourdon revient à la charge pour ne pas prononcer un avis sur des pièces collationnées.
R : Carrier indique que la Convention ne peut pas se prononcer sur des pièces qui contiennent des variantes aussi contradictoires.
Après un brouhaha Mailhe relit sa proposition mais un grand nombre de voix demande l’appel nominal. Un débat assez vif se déroule ensuite
Le décret est toutefois adopté :
- toutes les pièces originales, notamment les arrêtés des 27 et 29 frimaire, seront apportées sans délai au Comité de sûreté générale, après avoir été cotées et paraphées,
- la présente discussion continuera.
Clauzel informe que les esprits du public s’échauffent. Certains prétendent qu’on veut ralentir le procès, d’autres veulent soulever Paris en faveur de Carrier. La garde a été augmentée de 6 000 hommes. Il faut que demain, à 11 heures précises Carrier continue sa défense.
La séance est levée à 19 h30


séance du 23 novembre 1793
En préambule Raffron souligne que la séance d’hier a été paralysée par les discussions sur l’authenticité des arrêtés de Carrier. Mais la Convention est un jury d’accusation pas de jugement. Il n’est pas nécessaire d’avoir une opinion sur chaque pièce et de débattre avec le prévenu. Les hommes probes pensent à tort que les autres agissent comme eux, il ne doit donc y avoir ni accusateur ni défenseur dans l’Assemblée. Ensuite il y aura appel nominal, et il demande que ce soit aujourd’hui.
Guillemardet soutient que les faits doivent être examinés l’un après l’autre et que le prévenu puisse répondre. Ce qui est fait aujourd’hui pour Carrier peut être fait demain pour chacun d’entre eux..

Le président annonce que Carrier se dit malade.
Une discussion entre Lanot, un député non désigné, Taillefer, et Legendre s’engage pour savoir comment procéder. Ce dernier critique les Montagnards qui veulent sauver Carrier. « On a demandé des preuves matérielles, eh bien, si vous en voulez faites refluer la Loire (applaudissements) faites amener les bateaux à soupape, faites venir les cadavres des malheureuses victimes... ». La prétendue maladie de Carrier ne peut empêcher son jugement. Il doit être sommé de venir.
La proposition est décrétée. Le président appelle au calme en attendant Carrier.

Lorsqu’il entre plus tard, un grand silence se fait.
Il continue a réfuter les accusations portées contre lui.

57 – par lettre du 20 décembre il annonce à la Convention qu’on amène les brigands par centaines, il les fait fusiller, la guillotine ne pouvant suffire. Il invite Francastel à l’imiter.
R : sa lettre a été insérée au bulletin et on ne l’a pas rappelé, signe d’approbation.

58 – il a ordonné de noyer des femmes enceintes et le mari d’une « amie ».
R : Ces horreurs sont avancées par un certain Gauthier. C’est un faux, car dans la lettre il indique que Grammont était son complice. Or il n’a jamais vu Grammont à Nantes et ce Grammont avait quitté l’armée avant son arrivée.
Bourbotte qui est resté 15 mois en Vendée, confirme l’affirmation de Carrier concernant Grammont.
R : Carrier affirme donc que l’ensemble du témoignage n’est pas crédible et où sont les preuves ? Il sait par contre que le comité révolutionnaire a donné ces ordres atroces en prétendant les avoir reçu verbalement de sa part. Il défie ses nombreux ennemis, ennemis de la révolution de Nantes, de montrer un seul ordre écrit et il montera à l’échafaud. Pendant 10 mois qu’il est resté à Nantes aucun patriote ne s’est plaint. Il a fait noyer le mari de sa maîtresse ? Qu’on le nomme. Toute la lettre de ce Gauthier, qui est peut-être parmi les accusés du comité révolutionnaire de Nantes (probablement Jacques Gauthier, coutelier, de la compagnie Marat) contient un faux matériel et on ne peut donc y ajouter foi.
Lofficial intervient : que Carrier dise, s’il n’a pas donné les ordres pour noyer des femmes enceintes, pourquoi il ne les pas empêché ?
R : Il allait souvent aux armées et on fait la même chose à Laval, Angers, Saumur, Château-Gontier. Il ignorait les crimes de Nantes mais il y a eu des noyades à Saumur. Au château d’Aux, des brigands ont été précipités dans la Loire, ainsi qu’à Paimboeuf. Il ne l’a su qu’après. A Laval, c’est un général qui l’a écrit à l’Assemblée et un volontaire le lui a confirmé. Mais pas un seul nantais l’a prévenu. Les prisonniers étaient livrés à la commission militaire qui les jugeait, il ne s’en mêlait pas.
Plusieurs députés interviennent pour réfuter les propos de Carrier concernant les noyades, à Saumur et ailleurs.
R : il n’accuse personne mais affirme qu’il s’est trouvé dans la même position que ses collègues.
Un député (non nommé) rapporte le propos d’un témoin (non nommé) qui reprochait à Carrier de toujours faire noyer « Tu en verras bien d’autres, nous avons donc des femmes à sans culottiser donc à noyer ».
Bourdon de l’Oise affirme que tous ses collègues envoyés en Vendée se sont conduits avec humanité.
Carrier se défend en disant que comme lui, ses collègues à Saumur et à Angers ignoraient ce qu’il se passait.

59 – selon une lettre de Bô adressée au tribunal révolutionnaire de Paris, le comité de Nantes, interrogé sur les noyades, lui a remis un arrêté de Carrier transférant des prisonniers à Belle-île.
Un député s’insurge « jamais nous n’avons eu connaissance de noyades à Laval »
Le président de la Convention intervient pour que l’assemblée suive l’ordre des questions
Prieur (de la Marne) qui vient d’entrer, donne son témoignage. Après Savenay il est resté 24 h à Nantes et son secrétaire l’a prévenu que Carrier se préparait à prendre des mesures extraordinaires contre les prisonniers. Il demanda à Carrier de venir le voir et lui dit que sur le champ de bataille on peut exterminer, mais qu’ensuite cela appartenait à la commission militaire. (On applaudit) Il précise que « nos braves défenseurs » ne faisaient aucun mal aux prisonniers mais que les brigands les massacraient. Il leur dit que, marchant à leur tête ils ne feraient alors plus de prisonniers et que, cerné, il demanderait à son collègue Bourbotte de le tuer et qu’il lui rendrait le même service. (On applaudit). Après la remarque faite à Carrier il est parti.
Carrier lui demande le nombre de brigands en prison à Nantes.
Prieur répond 3 000, selon la commune.
Carrier rétorque que la commission en a jugé 4 000.
Prieur répète qu’il a demandé à Carrier de faire cesser toutes mesures extraordinaires et son secrétaire a renouvelé la demande.
Thuriot intervient pour rappeler le laisser-passer donné à Lamberty.

60 - Reubell cite la lettre de Jullien fils à Robespierre ou Carrier lui avoue les noyades, disant qu’on ne révolutionne que par de semblables mesures et où il traite Prieur de la Marne d’imbécile car il se contente d’enfermer les prisonniers.
Dubois-Crancé demande à Laignelot de témoigner que Carrier lui a dit : « tu es bien plus heureux que moi, tu as un plus grand bassin et des bâtiments à ton service ».
Laignelot confirme cette phrase prononcée en présence de Beaudit (Marc Antoine Beaudot?).
Carrier explique qu’à la suite d’une épidémie il a fait transférer les prisonniers dans un local plus sain qu’il avait indiqué. Il interpelle Prieur.
Prieur concède qu’à Nantes on lui parla uniquement de la noyade de prêtres, sans accuser Carrier. Ensuite le seul reproche qu’il a entendu sur son compte c’est d’avoir dit à la Convention qu’il n’y avait que des aristocrates à Nantes.
Carrier insiste et dit qu’ayant appris la noyade des prêtres il en a fait part simplement à la Convention. Les brigands noyés à Ancenis ? Ils l’ont été quand ils ont voulu traverser la Loire, parce qu’il avait fait placer des canonnières qui les ont tués. Pour le mandat donné à Lamberty il demande à Bourbotte de témoigner qu’il s’agissait bien d’espionner.
Bourbotte répond qu’il n’en sait rien.
Thuriot insiste sur le permis donné à Lamberty.
Carrier répond qu’il ne contient aucun ordre de noyade et que si on trouve un ordre, comme on le prétend, de laisser passer Lamberty avec un gabareau de brigands, il accepte d’être condamné.
Bourdon (de l’Oise) lit l’intégralité de l’ordre. Il y est question d’une expédition où Lamberty peut prendre avec lui le nombre de personnes qu’il veut.
S’ensuit un échange entre Carrier, Bréard, Bourdon, Bonnet sur le sens du mot expédition. Dartigoeyte fait remarquer que des frais ont dû en découler. Carrier prétend alors qu’il payé lui-même Lamberty sur un compte-rendu verbal.
Laignelot indique qu’avant la dénonciation de Carrier il a été voir Robespierre alors « incommodé » et qu’il lui a décrit les horreurs commises. Robespierre a répondu « Carrier est un patriote, il fallait cela dans Nantes ». Il entendu en outre Carrier dire qu’il vengerait la mort de Lamberty et Fouquet, les deux meilleurs patriotes de Nantes.
Clauzel précise de nouveau que ces prêtres trop âgés n’étaient pas soumis à déportation.
Coren-Fustier dit que lui-même a cru que c’était un accident.
Sevestre rapporte qu’au retour de Carrier il lui a dit « Tu as commis des horreurs à Nantes, tu as traduit des nantais au tribunal révolutionnaire […] certains, bons patriotes, seront acquittés. Et bien me répondit-il, je les ferai tous guillotiner ».
Dumont témoigne que lorsqu’il fut question de déporter tous les prisonniers, Carrier a dit « Oui, déportés à ma manière ».
Merlin (de Douai) rappelle à l’ordre ses collègues pour laisser Carrier s’exprimer.
Carrier dément d’abord le propos cité par Dumont ensuite il demande à Sevestre de confirmer qu’il a tout fait pour éviter aux notables nantais « d’être jugés par la tribunal de Robespierre ».
Sevestre maintient son propos.

61 - il a fait fusiller tout un bataillon de cavaliers ennemis qui se rendait avec armes et bagages, suite à une amnistie.
R : non, ils étaient trente et il peut prouver qu’il les a fait conduire en prison. Jamais il n’a donné l’ordre de les fusiller.

62 – nombre de révoltés qui se rendaient ont été sabrés. Il a fait noyer des femmes, des filles et enfants. Il a fait fusiller de paisibles paysans, sans interrogatoire. Il a fait enfermer des femmes suspectées « d’inconduite » puis les a fait noyer. Il a arrêté des femmes suspectées d’aller parfois à la messe.
R : Cette dénonciation (de Phelippes-Tronjolly) n’est pas signée. Il nie les accusations, il n’a jamais attaqué les brigands qu’en corps d’armée. Il lit alors un arrêté pris au sujet de femmes mises à un atelier de couture (non joint).

63 – Plus de 80 brigands s’étant rendus, il les a fait conduire à l’entrepôt, pour y subir le même sort que les autres.
R : c’est la commission militaire qui les a jugés. Il ne s’en est pas occupé et ne l’a pas su.

64 – un soir, 2 militaires le prévinrent de l’arrivée de 300 prisonniers venant d’Ancenis. Il leur répondit « comment f… d’imbéciles que vous êtes, f… moi tout ces b… là dans l’eau et que demain il n’en soit plus question ! »
R : il nie le fait. D’autres personnes l’auraient entendu puisqu’il sortait de la société populaire à ce moment-là et son dénonciateur, Giraud (directeur des postes voir accusations n° 1 et 2) est un aristocrate.

65 – la société populaire de Tours, suite à l’indignation publique, a demandé à celle de Nantes des explications sur l’action de Carrier, Hentz, Francastel et les autres représentants.
R : C’est une conjuration contre tous les représentants envoyés en Vendée. Bientôt tous les représentants seront inquiétés. Mais la Convention saura un jour la vérité sur la guerre de Vendée. Par exemple à l’affaire de Villiers (probablement bataille de Vihier en mars 1793) on a dit que les pertes étaient de 600 républicains alors que 30 000 ont été massacrés (???) sur le champ de bataille.
C’est faux interrompt un député.
Carrier reprend et cite Coron où 3 000 brigands ont mis en déroute 100 000 soldats (juillet 1793, ????). Mais c’est parce qu’il a contribué le plus à éteindre la guerre de Vendée qu’on veut le perdre.

66 -en soupant chez le directeur de l’hôpital militaire d’Ancenis, Carrier s’est vanté d’avoir fait noyer et fusiller un grand nombre d’aristocrates, qu’il n’a pas été assez longtemps à Rennes pour en faire autant et qu’il avait écrit à Francastel de faire noyer les 132 nantais envoyés à Paris « ce foutu couillon n’a pas osé ».
R : un seul particulier a fait cette déclaration, où sont les autres ? A Rennes il a seulement fait quelques arrestations.
Carrier demande ensuite à se reposer . La séance reprend deux heures plus tard.

67 – Perrote Brevet est venue lui demander la grâce de son frère, emprisonné, il lui a répondu « ...il est bon à foutre à l’eau et bien d’autres à sa suite et les trois quarts de Nantes ». Elle est revenue le supplier pour avoir la permission d’aller voir son frère en prison. Il l’a battu, l’a chassée puis lui a proposé un chantage honteux.
R : Perrote Brevet est une brigande, comme tous les habitants de Saint Julien (de Concelles). Ce sont les femmes qui les recrutaient. Si son frère était à l’entrepôt, c’est qu’il était brigand. Il jure qu’il ne l’a jamais vu et qu’il n’a jamais frappé une femme. Que tous ceux qui l’ont connu en témoignent, que l’armée de l’ouest, ses collègues, disent qu’il a fait tous ses efforts à Montaigu, à Cholet, pour faire respecter le sexe.. C’est le comité de Tours qui a provoqué celle de Nantes pour « vomir contre moi les plus atroces inculpations ».

68 – Selon la société populaire de Nantes, plusieurs représentants du peuple ont participé ou vu des atrocités : les femmes et les enfants égorgés, des magistrats en écharpe fusillés, des milliers de détenus noyés, exécutés, des patriotes sacrifiés,
R : cette déclaration ne s’applique pas à lui mais à tous les représentants en Vendée.

69 – Vailli un canonnier déclare que, courant brumaire, Fouquet et Lamberty, dans un gabareau accompagnant un bateau chargé de prêtres ont présenté un laisser-passer de Carrier à un factionnaire. Il a entendu ensuite les cris des noyés. Un mois après plus de 800 personnes ont subi le même sort, dépouillées, noyées, coupées par morceaux et fusillées. Le butin était revendu. Il y a eu deux autres noyades conduites par les mêmes hommes. Le factionnaire évalue les victimes à plus de 2 000.
R : cela ne le concerne pas, il n’a jamais pu participer à de telles horreurs. Il ne connaît pas Fouquet.

70 – David-Vaugeois (accusateur de commission militaire) et Dumon (président du tribunal criminel militaire), témoignent que Lamberty et Fouquet voulaient enlever plusieurs femmes (prisonnières) dont 15 étaient enceintes et plusieurs enfants. Le président du tribunal et un membre de la commission militaire s’y opposèrent. Lamberty a présenté un ordre de Carrier disant qu’il avait fait d’autres expéditions. Le lendemain Carrier a convoqué le président de la commission et l’a menacé de mort si l’entrepôt n’était pas vidé dans les 2 heures. Lamberty lors de son procès a déclaré qu’il avait fait ces noyades sur cet ordre écrit de Carrier.
R : il ne voit pas la pièce originale. La copie peut être tronquée, inexacte. L’ordre donné à Lamberty du 7 décembre, était de surveiller les brigands et de poursuivre Charette. Or la noyade des prêtres a eu lieu le 17 novembre, bien avant. Pourquoi le déclarant n’a t’il rien dénoncé ? Et le président du tribunal , atteint d’une maladie contagieuse n’est jamais entré dans son cabinet de travail.

71 – les membres du comité révolutionnaire dans le procès en cours ont avoué avoir participé à ces exécutions avec des ordres verbaux de Carrier. Il n’écrivait que pour les transferts et donnait ses ordres le plus souvent à Goullin. Lamberty et Fouquet ont fait ainsi des mariages républicains, attachant ensemble, nus, un garçon et une fille avant de les noyer.
R : le comité pour se défausser rejette sur lui toutes les inculpations. Où sont ses ordres ? Il demande à Bô, Milhaud, Mirande, qui l’ont connu dès l’enfance, ceux qui l’ont fréquenté, qu’ils disent au nom de l’honneur, s’ils ont vu en lui l’approche d’une telle férocité.

72 – Carrier a menacé de son sabre Chaux l’un des prévenus lorsqu’il a demandé la liberté de plusieurs enfants. Il a fait noyer sans jugement 120 scélérats le 15 décembre. Avant d’être eux-mêmes exécutés Lamberty et Fouquet ont avoué que Carrier leur avait donné l’ordre de noyer les prêtres. Il a menacé de la guillotine une députation lui demandant s’il y avait une pièce originale de son ordre. A un reproche de toujours faire noyer, Carrier répondit « tu en verras bien d’autre, nous avons des femmes à sans culottiser ». Il a demandé de tirer sur une femme à sa fenêtre. Il a dit au président de la commission militaire « la guillotine, toujours la guillotine ». Il a fait noyer trois belles femmes dont il avait abusé.
R : C’est un prévenu (Goullin) qui a fait cette déclaration. Il demande à Bourbotte de témoigner de leur arrêté pour sauver les enfants de la guillotine.
Bourbotte témoigne qu’il n’a signé qu’un acte avec Carrier et c’est celui-là.
Treilhard demande pourquoi cet arrêté a été pris, un décret existait déjà pour les enfants ;
Une voix : il a été pris lorsqu’il n’y avait plus personne à noyer !
Bourbotte : le décret (de la Convention) ne précisait pas l’âge. Carrier l’avait alerté sur le grand nombre de brigands prisonniers après Savenay dont des enfants. Voilà le motif. ( l’arrêté est du 2 mars 1794).
Carrier : voilà comment arrive la calomnie. Il avait déjà distribué des enfants aux citoyens, l’un de plus de 18 ans, à un marinier, 3 à Boussain, directeur de l’hôpital. Il lit leur arrêté. Comme le décret ne fixait pas d’âge il n’a pas voulu décider seul. Il avait donné des garanties secrètes à trois communes pour les préserver, car il craignait l’échafaud. Bourdon et Goupilleau ont été longtemps sous la hache de la loi pour trop d’indulgence.
Bourdon évoque des victoires réussies grâce à l’indulgence.
R : il ne connaissait que les décisions de la Convention et celui qui témoigne (Phelippes-Tronjolly) présidait le tribunal criminel et lui a écrit après son départ.
Les lettres sont lues. Dans la première Phelippes-Tronjolly déclare sa confiance à Carrier, mal entouré, qui doit se méfier de Goullin, poursuivi pour meurtre, et de Grandmaison qui l’a protégé. Ils ont fait noyer des prisonniers.
R : parti le 18 mars de Nantes (16 ou 17 février) Phelippes lui écrit le 4 avril. Et maintenant il vomit les plus grandes horreurs contre lui. Cette lettre atteste ce qui a été fait à son insu.
On lit la seconde lettre de Phelippes-Tronjolly, indulgente envers Carrier. « tu es trop bon républicain pour avoir trempé dans les délits que mon devoir m’oblige à dénoncer ».
R : cet homme, ce fédéraliste ne mérite aucune confiance ce n’est que mi-août qu’il a lancé ses accusations. Avec les 94 nantais, c’est un complot.

73 - Pierre Robert, batelier, a été forcé de conduire son bateau pour 4 noyades l’hiver dernier ; sur ordre d’Affilé. La première avec 58 personnes attachées deux à deux, la seconde 800 des 2 sexes, la quatrième 300. Les bateliers étaient battus, et n’ont pas été payés totalement.
R : il n’a jamais connu cet Affilé et il n’y a aucun ordre de sa main. Le comité, selon le procès en cours a payé 2 ou 3 gabarres à cet homme.
74 – Carrier n’a jamais eu le courage d’aller à la tête des armées, il passait ses nuits en orgies et faisait noyer les femmes qui lui plaisaient.
R : Dans sa première lettre le témoin (Lebeaupin) a commis 3 faux matériels. Qu’on demande à ses collègues s’il n’a pas été avec eux à la tête des colonnes. Il n’a jamais passé une nuit hors de chez lui et travaillait avec les généraux, l’état-major.

75 – Il est venu manger 2 ou 3 fois sur la galiote de la noyade des prêtres.
R : il ne connaît pas ce témoin (Pierre Sourisseau) mais à Nantes on achète facilement les gens.

76- il passait son temps en orgie, désignait ses victimes avec Forget, le comité révolutionnaire, Girardot et Renard. Il a forcé Ducros à lui donner sa maison dont il a fait un sérail.
R : toujours Orieux dont il a déjà démontré les faux. Il n’a vu Forget qu’une seule fois, un patriote. Il ne connaît pas Girardot. Faire des orgies avec Renard le maire de Nantes ? Incroyable. Ducros lui a proposé un petit réduit et non pas sa maison pour se reposer, il était malade. Lequinio peut en témoigner.
Lequinio veut témoigner mais Bourdon le coupe et réclame l’exécution du décret (de procédure, qui interdit les digressions). L’Assemblée continue l’ordre du jour.

77– Colas Fretau, marinier lui a remis une pétition pour lever l’embargo sur la navigation en nivôse. Carrier était avec 2 femmes. Le marinier eu juste le temps d’esquiver un coup de sabre.
R : ils le fatiguait avec ces demandes, c’était impossible, les brigands s’approchaient de Nantes.

78 – il entretenait avec la femme du directeur de l’hôpital un commerce scandaleux. On la sollicitait. Elle faisait fabriquer des petits pains pour lui sur la farine de l’hôpital. Lorsque la lingère Louise Courand demanda qui la paierait Carrier répondit « la guillotine ».
R : . Est-ce seulement crédible ? Cela démontre jusqu’à quel point la méchanceté est portée contre lui. Il refuse de répondre.

79 – selon le témoignage de Dechartres, il ressort d’une conversation surprise que des hommes faisaient enlever des femmes et les emmenaient à Carrier qui les faisait ensuite noyer.
R : on prétend également que c’était le général Vimeux et ses officiers qui le faisait. Que Bourbotte atteste de la conduite de ces militaires et qu’on cite une femme, une seule qu’il aurait fait périr ainsi.

80 – deux commissaires rencontrèrent Carrier à Paris pour lui demander des subsistances. Il leur donna son appui puis le lendemain se répandit en injures et menaces sur Nantes.
R : ces propos sont invraisemblables. Seul un fou aurait pu parler ainsi. L’un de ces commissaires est un ancien prêtre, échappé de la Vendée qui a été longtemps chez les brigands.

81 – Bignon (président de la commission militaire révolutionnaire) témoigne que Lamberty et Fouquet disaient avoir une mission mi écrite mi verbale pour noyer des prêtres, des prisonniers. Carrier menaça le président de la commission militaire de mort pour vider l’entrepôt. Lors du procès de Fouquet et Lamberty, rentré à Paris, Carrier a nié avoir donné des ordres.
R : il a déjà répondu à ces accusations. Qu’on produise l’original de son ordre à Lamberty.

82 – le 17 décembre, a été consigné au registre du tribunal criminel l’ordre de Carrier d’exécuter, sans jugement, 24 brigands pris les armes à la main.
R : Il n’a donné aucun ordre et il demande à voir les pièces. Il ignore si l’arrêté est signé de lui et s’il est conforme à l’original.





Faits reprochés à Carrier, avant sa mise en accusation

  Les faits reprochés à Carrier et ses réponses avant sa mise en accusation par la Convention Les faits reprochés sont les 82 accu...